vendredi 18 juin 2010

Les hussards de la république

A notre arrivée à l'école publique de Maharajpet, le Directeur M. G. Kamal Singh,  s'est empressé de nous faire part des résultats obtenus par ses élèves aux examens de fin d'année. Le premier d'entre eux, avec un score de 515 sur 600, est arrivé en tête du classement des écoles du district. Alors que la rentrée s'était déroulée deux jours plus tôt (les grandes vacances en Andhra Pradesh sont de fin avril à mi-juin), nous nous sommes étonnés de voir autant de nouveaux élèves reconnaissables à ce qu'ils ne portent pas d'uniformes. M. Singh nous a alors expliqué que l'école privée du village ayant augmenté les frais d'inscription, de nombreux enfants qui l'avait rejointe ont refait le chemin inverse pour revenir à l'école d'état. Parallèlement, il avait reçu pour instruction de son ministre de tutelle de scolariser un maximum d'élèves des villages alentour. Avisant alors un ado dégingandé de treize ou quatorze ans, vêtu d'une chemisette usée et d'un pantalon à l'ourlet déchiré, il lui attrape le bras affectueusement et me le présente comme étant un "regular", un élève qui fréquente assidûment l'école, obtenant de bons résultats dans la plus haute classe, l'équivalent de notre troisième. Et M. Singh de m'expliquer qu'il avait dû enfourcher son cyclomoteur et parcourir avec les quatre kilomètres qui séparent l'école du village du garçon, pour parlementer avec ses parents afin qu'ils le laissent poursuivre ses études. En effet, si les parents ne renâclent pas trop à envoyer leurs enfants en bas âge à l'école, laquelle fait souvent office de garderie et leur garantit un repas quotidien, pour les plus grands, c'est une lutte perpétuelle. Scolarisés, ils représentent autant de bras en moins pour aider dans les champs ou garder les chèvres et les buffles. M. Singh fait un travail remarquable dans cette école ; il n'a en principe que la responsabilité des grandes classes, celles du collège mais en fait, il s'occupe aussi de la maternelle et du primaire car comme il  le dit lui-même, il investit sur l'avenir. Parmi les enseignants, certains sont payés par le gouvernement, d'autres par des particuliers comme nos amis Isabelle et Venkat ou Vincent. L'un d'entre eux a réussi ses examens et une  fois titularisé, a choisi de revenir enseigner l'anglais dans cette école. Je lui ai demandé s'il était content de ce retour et sa réponse a été un cri du cœur : "Je suis le plus heureux des hommes !" Une déclaration qui n'est pas sans rappeler le sacerdoce des premiers maîtres d'école d'une autre république...

9 commentaires:

bricol-girl a dit…

J'ai entendu que l'école devenait obligatoire mais jusqu'à quel age?

bricol-girl a dit…

Je viens de regarder sur picasaweb. Comme tu dois te sentir utile, le sourires des enfants est une merveilleuse récompense, bravo.

Eperra a dit…

Merci Mab. Restant finalement peu de temps dans ce pays, je souhaitais faire quelque chose de concret. Avec une copine, nous avons collecté des fonds auprès de nos amis et de la communauté expat d'Hyderabad qui nous ont permis d'acheter 200 uniformes, autant de chaussures (tongs) et des fournitures scolaires pour la nouvelle rentrée. Après nous, d'autres sont prêts à prendre le relais. Les petits ruisseaux font les grosses rivières ...

Simplement ... a dit…

Bravo à toi ...
Tes billets me touchent toujours beaucoup ...
Bisous
Marie-Ange

Anonyme a dit…

Très intéressant le reportage sur Picasa. Merci de nous faire partager ces instants de bonheur.
SaFran (Sally-François)

Fauvette a dit…

Quel bel enthousiasme, cela fait du bien de lire ce billet.

Valérie de Haute Savoie a dit…

Ces uniformes sont ils si important ? Ce n'est pas une question ironique, loin de là, j'ai envie de comprendre l'importance de ce vêtement dans la scolarité des élèves. En France c'est devenu tellement désuet.

Eperra a dit…

Valérie, je m'attendais à cette question. Tout d'abord, je pense que l'uniforme est un héritage des 200 ans d'occupation Britannique. Ensuite, l'uniforme marque l'identité de l'école, cela va du très simple dans les écoles comme Maharajpet (chemisette blanche pour tous, jupes ou robe pour les filles, shorts ou pantalons pour les garçons, de couleur bleu marine) à des tenues plus sophistiquées avec cravates, écussons, chaussures fermées et chaussettes blanches (avec la chaleur !) dans les écoles privées. Dans le cas des élèves pauvres, c'est surtout une manière de les intégrer car faute de vêtements corrects, ils n'y auraient même pas accès. Regarde les photos, certains sont encore pieds nus !

mariemadeleine a dit…

C'est ainsi que je conçois l'enseignement, avec ferveur, même dans nos écoles et c'est ce que je retrouve chez Célestine.

Merci pour les belles photos sur picassa!