Quand notre nouvelle amie Isabelle nous a proposé de nous emmener visiter une école de campagne, j'étais loin de m'attendre à ce que j'allais trouver. Après quarante minutes de petites routes au milieu de rizières et autres paysages bucoliques, nous avons pris un petit chemin cahoteux et traversé un ou deux villages très pauvres avant de découvrir l'école. Deux ou trois bâtiments délabrés, un projet de chantier d'agrandissement commencé il y a deux ans et jamais terminé, et dans la cour, quelques arbres plantés par une équipe de volontaires mais qui ne donneront pas d'ombre de sitôt. La Maharajpet Government School, c'est son nom, est en fait un établissement scolaire qui regroupe 10 classes de la petite maternelle à la seconde. Le principal nous attendait, prévenu à la dernière minute de notre visite, sinon les écoliers auraient préparé notre accueil en grandes pompes ce qui aurait perturbé leur travail. Isabelle, en bonne ancienne instit qu'elle est, veille à ce que pour ses protégés, apprendre reste la priorité. Le plus triste, ce sont les tout-petits. Leur maîtresse fait de la garderie, d'ailleurs elle s'est précipitée dans la classe quand nous sommes arrivés. Ils jouent à même le sol battu ou sur quelques tapis usés jusqu'à la corde avec un ballon, quelques jouets ou des ardoises apportés par d'autres avant nous. Quand j'ai demandé naïvement à Isabelle pourquoi ils étaient là dans ces conditions, elle m'a répondu avec sa franchise habituelle : "Ben, pour manger !" Le gouvernement Indien veut combattre l'analphabétisme dans les campagnes et fournit les repas. Ainsi, les parents mettent leurs enfants à l'école dès leur plus jeune âge, et ils y prennent goût et font tout pour y rester. La plupart des plus grands, en primaire, étaient assis en tailleur à même le sol, seuls les grands du collège avaient droit à des tables et des chaises, souvent suite à un projet de soutien. La cuisine est tenue par un couple qui vit sur place et on se demande comment il fait pour servir 250 repas par jour avec juste un énorme faîtout sur un réchaud au gaz, dans des conditions d'hygiène et de confort plus que sommaires. Un des projets de rénovation de l'école, raison de notre visite, est de réhabiliter la cuisine. L'été dernier, des étudiants de Glasgow ont passé tout leur été à construire des toilettes dans la cour. Le plus cocasse, si on avait le cœur à rire, c'est la salle informatique. Le gouvernement a fourni une quinzaine d'ordinateurs que les jeunes Ecossais ont installés lors de leur séjour, oui mais voilà, dans les campagnes il n'y a pas d'électricité de 9 heures à 18 heures ! Qu'à cela ne tienne, des cours sont quand même organisés de 8 à 9 et les gamins viennent à pied, de très loin parfois, pour ne pas les manquer. Un générateur serait la solution mais il faudrait 50 roupies par heure (75 centimes d'euro) pour le faire marcher et l'école n'a pas de budget. D'après Isabelle, cette situation n'a rien d'unique, elle concerne toutes les écoles publiques de l'état et même de l'Inde toute entière. On ne ressort pas indemne d'une visite comme celle-là mais ce qui émerge de ce trop plein d'émotions, c'est le sourire de ces enfants, leur envie d'apprendre et leur fierté de nous la faire partager...
vendredi 12 février 2010
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12 commentaires:
Eh bien ça calme... Ce pays regorge d'énergies, et il sollicite vraiment beaucoup notre coeur.
je comprends ton émotion ! toi qui en plus es pédagogue tu n'as pas eu envie de t'assoir pour les aider ?;-)
PS: retiens l'adresse, il se pourrait que fin mars.....
Encore un récit qui remet bien des choses en place.
Y a quand même un truc que je ne comprends pas. Les jeunes Ecossais, plutôt que de venir installer des toilettes, s'ils avaient donné le coût de leur billet d'avion, l'école aurait pu être reconstruite de A à Z non ?
Et pendant ce temps en France, j'apprends que l'établissement d'enseignement où je travaille va jeter 30 tables et chaises en très bon état parce qu'on n'a pas de place pour les stocker et qu'on les a remplacées pour utiliser des crédits qui restaient en fin d'exercice et qu'on devait dépenser...
Oui cela doit être terrible d'être là, de ne pouvoir faire grand chose à l'instant. Et l'on pense alors à une sorte de parrainage.
Une amie m'a raconté ces merveilleux sourires qui sont comme un défi à la misère !
Je crois que l'Inde est un pays d'où l'on ne repart pas indemne ...
Bisous du coeur.
Marie-Ange
J'ai parrainé pendant 20 ans diverses écoles dont une en Inde , il me semble que c'est une bonne solution , j'avais des nouvelles une fois par trimestre et un compte rendu de ce qui avait été fait pour environ 20 euros par mois .Maintenant , je donne en France pour diverses causes ;
Coucou, Princesse Poule Noire!...
Ce sont ces écarts entre la vie privilégiée et la réalité de la vie ordinaire qui font de l'effet !
Je suis de l'avis de Brigitte, les parrainages sont très efficaces pour aider les villages. Car au travers d'un enfant c'est son école, son village qu'on aide à se moderniser, que dis-je, se "normaliser" plutôt !
Belle fin d semaine à toi.
Bises
- A tous, je suis peu présente sur les blogs en ce moment, ni sur le mien ni sur les vôtres, ne m'en voulez pas. Nous avons des visiteurs à qui je consacre un peu de temps.
- A Philos, ici plus qu'ailleurs, on ne voit bien qu'avec le cœur ...
- A celle qui va bientôt y retourner, il faudrait que j'apprenne le telougou pour ça ;)
- A Mab, si j'y parviens un peu, tant mieux...
- A DdC, c'est une école publique, on peut soutenir des projets mais pas juste donner de l'argent. Et crois-moi, ce qu'ils ont fait c'est déjà beaucoup.
- A Hermione, eh oui, la gabegie des pays riches face au dénuement des pays pauvres ...
- A Valérie, Brigitte et Lakevio, les parrainages servent à ça c'est vrai mais ça reste une goutte d'eau face à l'étendue des besoins.
- A Marie-Ange, non, on n'en sort pas indemne, c'est sûr...
Voilà (entre autres) pourquoi je rage lorsqu'ici, dans certaines banlieues, "on" brûle ou détériore des écoles... J'estime que c'est une grave insulte au courage de ces enfants.
- A la FCen2, ta colère est parfaitement justifiée.
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