Vu de France, avoir son chauffeur peut sembler le comble du luxe. Quand on le vit au quotidien, la réalité est toute autre. D'abord, ce n'est pas un choix. Dans une grande ville de l'Inde, tentaculaire, sans aucune signalisation ou presque, et à la circulation anarchique, le chauffeur est une nécessité pour des raisons de sécurité. Ensuite, c'est bien plus qu'un chauffeur, c'est une personne clé qui rend tout un tas de services. Le nôtre, par exemple, nous a trouvé une femme de ménage et comme elle ne parle pas l'anglais, il sert d'intermédiaire. Nous avons mis près de deux mois à dénicher la perle rare. Ravinder, comme tout être humain, a ses qualités et ses défauts. A son crédit, il est honnête, fiable, ponctuel et plutôt prudent. Que demander de plus à un chauffeur ? D'un naturel jovial, il ne sait pas quoi faire pour nous faire plaisir. Côté défauts, il est macho - comme quasiment tous les Indiens - têtu comme une mule et a une fâcheuse tendance à se mêler de ce qui ne le regarde pas. Chef de famille - au sens large du terme comme on peut l'être en Inde - je le soupçonne aussi de prodigalité mais après tout, ce n'est pas mon affaire. Avec "Sir" qu'il amène au bureau le matin et ramène le soir, ils s'entendent très bien, parfois un peu trop à mon goût. Il lui apprend le telugu, le fournit en cigarettes, café et mangues quand c'est la saison. Ils partagent le même barbier et sont même allés faire des poojas au temple ensemble. Avec moi, qui passe de nombreuses heures en sa compagnie, c'est différent. Il voue une véritable adoration à son ancienne "M'am", une Canadienne qu'il a conduite à droite et à gauche pendant deux ans, et il m'en parle sans arrêt. Rédhibitoire. Comme de nombreuses femmes d'expat, V., qui avait semble-t-il un train de vie qui n'est pas le mien, passait son temps en shopping. Pendant le premier mois, j'ai eu droit au pèlerinage : c'est là que V. achetait ses chaussures, ses sacs (!), ses tapis (!), qu'elle retrouvait ses copines pour déjeuner, allait faire son yoga. Le jour où j'ai demandé à Ravinder de me déposer chez mon coiffeur, et qu'il m'a conseillé d'aller plutôt chez celui de V., j'ai failli exploser. Rien de bien méchant, me direz-vous, mais bon sang qu'est-ce qu'il me tarde de rentrer chez moi pour retrouver ma petite Saxo !
lundi 5 juillet 2010
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9 commentaires:
Sans doute, il est persuadé te rendre service et en plus il arrondit ses fins de mois en allant chercher un pourboire chez le coiffeur.
mais ça reste chiant un homme qui ne peut s'imaginer qu'une femme peut être son égal.
C'est drôle... on croit toujours qu'avoir un chauffeur c'est le "must" et puis finalement, c'est quand même bien plus sympa de conduire soi-même sa petite voiture !!
En effet , il y a des bons et mauvais côtés !
Ah mais moi j'aime trop conduire pour supporter un chauffeur. Je déteste me faire conduire (et éconduire aussi :D) et puis cela me rendrais un tantinet grognon que l'on me parle tout le temps de l'ex :D
Moi, je suis admirative des chauffeurs indiens qui ont l'œil et la dextérité pour éviter ici, un piéton, là, un rickshaw qui traverse la route sans regarder, là encore un scooter à 4 passagers qui vous double à droite tandis qu'un vélo chargé de cannes à sucre se faufile à votre gauche.. des chauffeurs pourtant qui sont souvent très mal payés pour faire un travail que jamais je n'essaierai sur les routes indiennes : pas bon pour mon adrénaline.. Déjà que c'est spectaculaire en tant que passagère!!!Effectivement, avoir un chauffeur en Inde n'est pas un luxe mais vital :) Et comme je te comprends, Marie, j'ai souvent eu envie de prendre moi-même le volant quand un chauffeur un peu zélé se permettait de décider pour moi ;)
Yes Madam'
En effet, un chauffeur débrouillard, ça vaut de l'or en Inde : grâce au même chauffeur que nous retrouvons régulièrement à Bombay, nous avons découvert la nourriture populaire, pu trouver des boutiques sans véritable adresse cachées au fin fond d'une allée, entrer dans des studios de cinéma (il faut savoir donner un pourboire sans vexer, le chauffeur est un parfait intermédiaire entre nous et le gardien)... Mais il nous a aussi fait faux bond pour nous emmener à l'aéroport à 2 heures du mat.
D'accord avec Astia, il faut saluer la dextérité, l'habileté, l'expertise et la pratique de la conduite dans un environnement aléatoire, mouvant et instable. Avec en plus très peu de règles écrites (voire pas du tout) mais plein de règles tacites et implicites…
Par exemple, pourquoi Ravinder s'arrête-t-il quand tel flic lève le bras et pourquoi ne s'arrête-t-il pas quand c'est un autre ? Mystère …
@Moukmouk : une femme qui ne peut s'imager qu'un homme puisse être son égal serait tout aussi chiante !
chacun ses rêves....
Je ne rêve pas de chauffeur mais de température moins chaude ou d'un bon orage.
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